Monsieur le Premier Ministre,

Madame la Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation,

Madame la Ministre des Sports,

Monsieur le Ministre de l’Education Nationale,

Monsieur le Président de la CPU,

 

Objet : L’ANESTAPS sonne l’alarme : La jeunesse prête à se mobiliser !

 

Quelques mois après vos prises de fonctions respectives, alors que de nombreux défis vous attendent pour répondre aux besoins des français, je viens vers vous comme porteur d’un message d’urgence de la part de la jeunesse française.

En effet, partout en France, les étudiants en Sciences et Techniques des Activités Physiques et Sportives (STAPS) sont prêts à se mobiliser pour dénoncer la situation actuelle de leur formation. Ces mobilisations massives seront la réponse d’un ras-le-bol, dû à une disparité entre les discours tenus et la réalité amenant une incompréhension totale.

Le 13 septembre dernier, la France s’est vue attribuer les Jeux Olympiques et Paralympiques 2024, reflet d’une volonté politique et gouvernementale de faire de notre pays une nation et une société sportive. Cependant, alors que nous sommes à quelques mois de recevoir la coupe du monde féminine de football, les championnats du monde de rugby et d’autres événements sportifs internationaux, la France est dans l’incapacité de répondre aux besoins des jeunes en terme de formation vers les métiers du Sport et de l’Animation. Depuis maintenant 19 ans, l’ANESTAPS (Association Nationale des Etudiants en STAPS) alerte les différents gouvernements qui se sont succédés sur les problématiques liées à la formation dans le champ du sport et reste sans retours suffisants.

Ce sont environ 10.000 jeunes qui n’ont pas pu accéder à la formation STAPS à la rentrée 2017. Alors que ParcourSup est ouvert depuis quelques jours, les jeunes se posent plusieurs questions : qu’adviendra-t-il de cette rentrée 2018 ? Allons-nous encore laisser nos UFR STAPS dans l’incapacité d’accueillir ces jeunes voulant s’orienter vers une formation et un parcours professionnel ? Allons-nous encore laisser nos UFR STAPS sans moyens pour accompagner les étudiants vers la réussite ? Allons-nous regarder une année de plus, le mythe de la démocratisation de l’enseignement supérieur s’envoler ?

Alors que nous sommes en pleine refonte de notre système d’enseignement supérieur, la loi “Orientation et Réussite des Étudiants” avait pour but d’accompagner les jeunes dans la réalisation de leur projet professionnel et de les orienter vers le parcours de formation en adéquation avec celui-ci, tout en laissant le dernier mot au bachelier. Pour autant, à quelques mois de l’affectation de milliers de futurs bacheliers, le constat actuel est alarmant. Les attendus, idéologiquement créés pour permettre d’accompagner au mieux les étudiants vers la réussite, se révèlent être, tristement et sans surprise, un réel critère de sélection.

Ces derniers avaient pour objectif d’identifier les compétences manquantes aux lycéens afin de leur proposer un parcours personnalisé. Pour autant, ils vont servir à classifier sans ex-aequo, tous les vœux comme si l’Université devenait tout d’un coup élitiste, poussant notamment les bacs technologiques et professionnels en marge, voire sans possibilité de poursuite d’études au sein de nos universités, garantes de l’émancipation et du développement individuel.

Chemin faisant, les attendus ont été détournés de leur but premier et vont assouvir le désir de certains, celui de trier les jeunes aboutissant à une sélection.

Notre crainte se traduit par la volonté des établissements de choisir les notes pour classifier les jeunes, se réservant ainsi le droit, dans le cas où le nombre de demandes dépasse celui des capacités d’accueil, de sélectionner uniquement les meilleurs dossiers. Alors que la loi relative à l’Enseignement Supérieur vise « l’élévation du niveau de qualification du plus grand nombre », pour tendre vers l’objectif de 50% d’une classe d’âge diplômée du supérieur, n’est-ce pas hypocrite de donner moins de moyens aux Universités pour accueillir, ne serait-ce que 50% des bacheliers de leur académie ?

Les capacités d’accueil instaurées depuis 2012 en STAPS, ne seront pas augmentées à coup sûr, faute de moyens, d’enseignants, d’infrastructures sportives et de locaux comme l’a récemment réaffirmé la Conférence des Directeurs et Doyens STAPS :

« La C3D a donc décidé ce jour de ne pas afficher sur ParcoursSup de capacités supérieures à celles de l’année dernière, tant que les UFR et départements STAPS n’auraient pas l’assurance que les moyens demandés n’ont pas été clairement fléchés sur leurs formations. Evidemment, nous les augmenterons dès que les moyens qui nous seront alloués l’autoriseront. »

Nous supposons que pour près de 10.000 jeunes qui n’accèderont toujours pas à la filière de leur choix à la rentrée 2018, la seule option reste une formation payante du Ministère des Sports. Pire, vous avez fait le choix avec le gouvernement de faire pression pour faire passer sans tenir compte de la démocratie ce jeudi 18 janvier 2018 en CPC (Commission Professionnelle Consultative) la Mention Complémentaire alors que les associations et partenaires s’y sont opposés à la majorité en Conseil Supérieur de l’Education et sous-commission de la CPC. Quel intérêt pour un jeune de passer à Bac+1 la moitié d’un BPJEPS d’équivalence à un niveau BAC et ne délivrant aucune prérogative d’encadrement, forçant ainsi les jeunes à payer en complément de cette mention complémentaire, les deux derniers UC du BPJEPS pour pouvoir s’insérer sur le marché de l’emploi.

Qu’en est-il de votre volonté de travailler avec nous, notamment pour plus de lisibilité dans les systèmes de formation et une meilleure articulation ?

Alors que vous ouvrez le droit à une sélection à l’entrée de l’université, que les UFR STAPS n’augmenteront pas leurs capacités d’accueil sans assurance budgétaire (à savoir un fléchage de la part des Universités) et d’enseignants supplémentaires de la part des recteurs, que le gouvernement se résigne à faire passer la Mention Complémentaire, que les places au CAPEPS diminuent de 160, quel message voulez-vous faire passer aux jeunes voulant s’orienter vers les métiers du sport ?

Pour l’instant nous nous résignons à voir que la France n’est pas à la hauteur de ses engagements en terme de formation dans le champ du sport.

L’ANESTAPS n’a pas cessé de vous prévenir ainsi que les Universités sur ces nombreuses problématiques sans résultat. Je m’adresse ainsi à vous Madame la Ministre de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, Madame la Ministre des Sports, Monsieur le Ministre de l’Education Nationale, Monsieur le Président de la CPU, Monsieur le Premier Ministre, afin de vous prévenir que la jeunesse n’a plus d’autres choix qu’une mobilisation nationale forte, pour faire entendre sa voix, si les choses n’évoluent pas suffisamment dans les jours à venir.

 

Dans l’attente de vous rencontrer, je vous prie de recevoir, mesdames et messieurs, mes salutations distinguées.

 

Mathias GOASMAT

Président de l’ANESTAPS

Retrouvez la lettre ouverte en PDF : Lettre ouverte-Janvier 2018